Objectif de la prestation compensatoire
La prestation compensatoire est destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que le divorce crée dans les conditions de vie respective des ex-époux.
Formes de la prestation compensatoire
Le principe posé à l’article 274 du Code civil est que la prestation compensatoire s’exécute en capital par le versement d’une somme d’argent ou l’attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou d’usufruit.
Lorsque le débiteur n’est pas en mesure de verser le capital dès que le divorce est devenu définitif, le juge peut fixer les modalités de paiement du capital, dans la limite de huit années, sous forme de versements périodiques indexés selon les règles applicables aux pensions alimentaires (article 275 du Code civil).
Il est tout à fait possible d’envisager une durée de versement plus longue dans le cadre d’un divorce par consentement mutuel.
La prestation compensatoire en capital peut être versée pour partie par le versement d’une somme d’argent ou l’attribution de biens ou de droits tels que prévus à l’article 274 du Code civil et pour partie par des versements périodiques (article 275-1 du Code civil).
C’est seulement à titre exceptionnel que la prestation compensatoire peut être versée sous forme de rente viagère lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins (article 276 du Code civil).
Le législateur ouvre la possibilité de minorer le montant de la rente, lorsque les circonstances l’imposent, par l’attribution d’une fraction en capital.
Régime fiscal selon les modalités de versement
- Une réduction d’impôt sur le revenu sous réserve que les versements sont effectués sur une période au plus égale à douze mois à compter de la date à laquelle le divorce est définitif
Le débiteur d’une prestation compensatoire en capital acquittée par le versement de sommes d’argent ou par attribution de biens ou de droits, sur une période au plus égale à douze mois à compter de la date à laquelle le divorce est devenu définitif, bénéficie d’une réduction d’impôt sur le revenu égale à 25% du montant des versements effectués, des biens ou des droits attribués dans la limite d’un plafond égal à 30.500 € (article 199 octodecies du code général des impôts).
Ainsi, le crédit d’impôt maximum est de 7.625 €.
Le créancier de la prestation compensatoire n’est pas imposé à l’impôt sur le revenu. Il devra s’acquitter d’un droit d’enregistrement fixe de 125 € (article 1133 ter du code général des impôts).
- La déduction du revenu global de la rente et/ou des versements de capital effectués sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le divorce est devenu définitif
Lorsque la prestation compensatoire est acquittée sous forme de capital par des versements de sommes d’argent, qu’ils soient ou non complétés d’une rente, sur une période supérieure à douze mois à compter de la date à laquelle le divorce est devenu définitif, le débiteur peut les déduire intégralement de son revenu global (capital + rente) (article 156 du code général des impôts).
Il en est de même lorsque la prestation compensatoire est acquittée sous forme de rente.
Le créancier, lui, doit corrélativement déclarer ces revenus et sera donc imposé à ce titre (article 80 quater du code général des impôts).
L’inconstitutionnalité du traitement fiscal de la prestation compensatoire mixte versée pour partie sous forme de capital sur une période au plus égale à douze mois et pour partie sous forme de rente
(Décision n°2019-824 QPC du 31 janvier 2020 du Conseil constitutionnel)
Il était refusé jusqu’à présent au débiteur d’une prestation compensatoire versée pour partie sous la forme d’un capital dans le délai de douze mois au plus et pour partie sous forme de rente, le bénéfice de la réduction d’impôt sur le montant du capital versé. En revanche, il pouvait déduire les rentes dans leur totalité.
L’objectif ici était d’éviter que des ex-époux raisonnent uniquement en termes de stratégie d’optimisation fiscale en limitant le montant des versements en capital au plafond de 30.500 € afin de bénéficier du montant maximal de cette réduction fiscale et de profiter également, pour l’intégralité du montant restant à verser, de la déduction fiscale des rentes prévue à l’article 156 du code général des impôts.
Aux termes d’une décision n°2019-824 QPC du 31 janvier 2020, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires à la constitution le fait de priver le débiteur d’une prestation compensatoire de la réduction d’impôt pour la partie versée en capital dans un délai de douze mois lorsqu’il s’accompagne d’une rente.
Il considère que « le simple fait qu’un versement en capital dans un délai de douze mois s’accompagne d’une rente ne saurait suffire à identifier une stratégie d’optimisation fiscale dès lors que les modalités de versement d’une prestation compensatoire, qui dépendent de la situation financière des époux, sont soit déterminées par le juge en fonction de l’âge ou de l’état de santé du créancier, soit homologuées par lui en fonction du caractère équitable des droits et obligations des époux ».
Il ajoute qu’« Au surplus, même si la réduction d’impôt prévue à l’article 199 octodecies avait pour objet de favoriser le règlement rapide des conséquences financières d’un divorce, les dispositions contestées n’y contribuent pas dès lors qu’un versement en capital sur une durée supérieure à douze mois accompagné d’une rente ouvre, lui, droit à une déduction fiscale de l’intégralité des sommes. »
Il conclut :
« Dès lors, en privant le débiteur d’une prestation compensatoire du bénéfice de la réduction d’impôt sur les versements en capital intervenus sur une durée inférieure à douze mois au seul motif que ces versements sont complétés d’une rente, le législateur ne s’est pas fondé sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l’objet de la loi.
Dans ces conditions, le paragraphe II de l’article 199 octodecies du code général des impôts méconnaît le principe d’égalité devant les charges publiques et doit donc, sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre grief, être déclaré contraire à la Constitution. »
Il convient de préciser que le paragraphe II de l’article 199 octodecies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi du 26 mai 2004 relative au divorce, jugé contraire à la Constitution, n’est plus en vigueur.
Dans les instances introduites à la date du 1er février 2020 (date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel) et non jugées définitivement, les créanciers d’une prestation compensatoire mixte peuvent donc se prévaloir la décision précitée pour réclamer l’application de la réduction d’impôt pour le capital versé sur une durée au plus égale à douze mois.
Source : https://www.conseil-constitutionnel.fr/decision/2020/2019824QPC.htm
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